#16 S’inspirer du jeu vidéo pour construire l’expérience employée

Inclusivement Vôtre – Côté Responsable RSE – Mickaël Newton

Pour écouter l’épisode 16

Parce que l’inclusion passe par l’accessibilité de tous nos contenus, notre podcast est retranscrit à l’écrit. Vous pouvez retrouver la transcription écrite de l’épisode ci-après.

Dans cette retranscription, vous allez lire des passages rédigés en écriture inclusive et d’autres non. Chez Projet Adelphité, nous utilisons quotidiennement l’écriture inclusive, c’est pourquoi les interventions de Laura sont rédigées de cette manière. Cependant nous souhaitons retranscrire avec fidélité la parole de l’invité’e. Nous avons donc fait le choix de ne pas appliquer l’écriture inclusive lors de ses interventions.

Bonne lecture.

Transcript Episode #16

Introduction

Bienvenue dans ce nouvel épisode d’Inclusivement Vôtre !

Inclusivement Vôtre, c’est le podcast qui envisage la culture d’entreprise comme un pilier stratégique du développement des organisations, avec un prisme diversité et inclusion.

Je m’appelle Laura Driancourt et je suis l’hôte de ce podcast créé et produit par Projet Adelphité, l’agence de conseil et stratégie en diversité et inclusion qui propose une approche multidimensionnelle pour mettre ce sujet au coeur de la performance des organisations.

Bonne écoute !

Présentation de l’épisode

Je joue aux jeux vidéos depuis que j’ai 6 ans, d’abord sur PlayStation, puis sur GameBoy et désormais sur PC. Les jeux vidéos sont un intérêt qu’on est plusieurs à partager dans l’équipe de Projet Adelphité.

D’ailleurs, plusieurs de nos clients sont des studios de jeux vidéos ou des éditeurs. Grâce à cela, nous connaissons bien les problématiques de diversité et inclusion rencontrées dans ce milieu.

Ce fut donc passionnant d’échanger avec Mickael Newton, responsable RSE chez Ubisoft.

Au cours des trois prochains épisodes, Mickaël partage avec nous son parcours et ses bonnes pratiques pour avoir plus de diversité et d’inclusion dans les jeux vidéos.

Cette première partie porte notamment sur la création de l’expérience professionnelle des salarié’es, le lien entre santé mentale et création de produits de qualité, l’accessibilité des jeux vidéos et le problème que pose la tokénisation.

Contenu de l’épisode

“Que les personnes se sentent le mieux possible pour délivrer les meilleures expériences possibles”

Laura : Bonjour Michael.

Mickaël : Bonjour Laura.

Laura : Je suis absolument ravie d’enregistrer cet épisode d’Inclusivement Vôtre avec toi. Merci beaucoup d’avoir accepté d’y participer.

Mickaël : Avec grand plaisir.

Laura : Comment tu vas ?

Mickaël : Ça va bien. Je cours partout comme d’habitude, c’est que ça va très bien.

Laura : Chouette c’est vrai que c’est une rentrée, j’ai l’impression, très remplie pour beaucoup de gens. Pour le contexte, on enregistre en septembre 2022 et j’ai l’impression qu’on a une rentrée tous et toutes hyper chargée.

Mickaël : Oui, absolument. C’est très dense et en même temps hyper stimulant. Je suis ravi de participer à ton podcast et de voir la suite.

Laura : Trop cool. Pour commencer, je te propose de te présenter, nous parler un peu de ton parcours ainsi que de nous parler de l’entreprise pour laquelle tu travailles.

Mickaël : Très bien. Je m’appelle Mickaël Newton. Je travaille chez Ubisoft, je suis au département responsabilité sociétale. Ce département est en train d’évoluer et est en train d’être renommé comme le département de l’innovation sociétale, c’est-à-dire de trouver des nouvelles réponses aux nouveaux enjeux du monde actuel. Chez Ubisoft, entreprise qui fait des jeux vidéo. En général, dans le milieu du jeu vidéo des jeux, les joueurs et les joueuses vont pouvoir faire leur propre chemin à travers des expériences qu’on espère le plus mémorable possible. Dans mon travail, le temps de travail est essentiellement de collaborer avec les associations, les ONG, de sorte à pouvoir trouver les meilleurs moyens de collaborer, de leur apporter du positif autant ces entités nous inspirent. De l’autre côté, j’ai également une casquette associative. Je suis le président d’une association qui s’appelle « Loisirs numériques » et ça résonne beaucoup avec ce que je fais professionnellement. C’est à dire que je fais des événements autour du jeu vidéo, c’est à dire autant des événements traditionnels comme des tournois, des tables rondes et puis également tout ce qui permet de mieux comprendre le jeu vidéo pour les personnes qui ne sont pas forcément initiées pour les parents face justement à leurs activités de leurs enfants. Et puis quelques idées caritatives, en tout cas solidaires, pour aller un peu plus loin que la mission du jeu vidéo qui est d’apporter du fun et de passer un bon moment. On a notamment un projet de bourse et plein d’autres projets assez originaux pour le domaine du jeu vidéo.

Laura : C’est trop bien que tu aies pu construire un parcours qui croise tes valeurs et une belle carrière dans le monde du jeu vidéo. Je pense que c’est le souhait de beaucoup de gens de réussir à faire ça. C’est un parcours qui est super inspirant. C’est pour ça que je suis super heureuse que tu participes au podcast parce que c’est important d’avoir des rôles modèles et je pense que tu rentres vraiment dans cette dans cette définition. En parlant de définition, comment en quelques mots, tu définirais la diversité et l’inclusion ?

Mickaël : J’ai entendu une belle phrase une fois qui pour moi correspond exactement à l’image que j’en ai. C’est que la diversité, c’est d’être invité à une soirée, tout le monde est invité, tout le monde est bienvenu et l’inclusion, c’est d’être invité à danser. En ce sens-là, c’est de pouvoir se dire que tout le monde est considéré dans le sens noble, c’est-à-dire en tant que l’individu, en tant que personne qui a un avis, qui a un point de vue, qui a un style, qui a des croyances, des volontés. De l’autre côté, que les personnes en face puissent respecter ça, non seulement les respecter mais les considérer, c’est-à-dire qu’on doit avoir des espaces d’expression assez importants pour que chacun et chacune puisse voilà se sentir soi-même, avoir des besoins qui sont assouvis. En tout cas idéalement, c’est-à-dire autant que des prétentions salariales, ça peut être la volonté de progresser en entreprise, ça peut être la volonté de se sentir tout simplement bien et que les personnes en face puissent renvoyer cela positivement. Ça, c’est super important. Ce n’est pas forcément plus facile à dire qu’à faire et je pense que c’est tout l’enjeu tant professionnellement que personnellement pour tout le monde de se sentir respecté et écouté.

Laura : Oui, ça paraît effectivement super important. Comme tu le dis, c’est plus facile à dire qu’à faire et chez Projet Adelphité, on considère que ça passe beaucoup par la culture d’entreprise. C’est aussi un peu l’idée de ce podcast. En quelques mots, pour continuer sur les définitions, comment tu définirais la notion de culture d’entreprise ?

Mickaël : Je vais essayer de trouver des mots simples et pas forcément m’étendre là-dessus, puisque je pense que la définition peut évoluer au fil du temps. La définition première que j’aurais  : c’est tout le cadre qu’une entreprise met en place pour que tout le monde se sente le mieux dans l’entreprise en question, qu’ils puissent y arriver, tant sur les objectifs professionnels, donc par rapport à son boulot, que tous les à-côtés. Tout ce qui permet de de justement se sentir bien, c’est-à-dire avoir le mobilier qu’il faut, ça va de la chaise qui soit assez flexible, jusqu’à avoir des petites choses positives un peu partout, ça peut être dans les salles de pause, ça peut être les fruits pour le snack. C’est tout ce qui est mis en place qui va du code de conduite d’une entreprise jusqu’aux choses un peu plus informelles qui sont mises en place, des soirées officielles et tout ce qui permet encore une fois aux individus de se sentir le mieux possible dans leur environnement professionnel.

Laura : Merci beaucoup. L’objet d’Inclusivement Vôtre, c’est de parler de culture d’entreprise comme pilier stratégique des organisations. Du coup pour toi, comment la culture d’entreprise peut s’articuler et s’articule avec la stratégie des organisations ?

Mickaël : Je pense que s’il y a une stratégie des organisations, c’est-à-dire pour n’importe quelle entreprise, d’avoir tout le maillage de ce qui fait une entreprise qui fonctionne sur le niveau de son activité business et pour le bien-être des personnes qui la composent, il faut que l’objectif business puisse être en phase avec les besoins des personnes en interne et vice versa. Quand on est dans une entreprise qui crée des jeux vidéo, c’est un domaine déjà très particulier. Que ce soit chez Ubisoft ou ailleurs, c’est avoir un temps de travail qui soit approprié. Dans le domaine du jeu vidéo, c’est très malléable. Créer un jeu vidéo, ça peut être sur trente-cinq heures comme ça, ça peut être beaucoup plus. La culture d’entreprise doit permettre de rendre ça le moins compliqué possible. Je vais m’expliquer là-dessus, parce qu’on considère que le jeu vidéo est un métier de passion et qu’on peut passer d’un temps infini sur le fait de construire des jeux. On est censé créer des univers où chacun va s’amuser, va passer un bon moment. Le fait de créer ces univers, ça peut être plus de trente-cinq heures. En tout cas, des gens qui bricolent dans leur coin, qui font leurs propres expériences, peuvent passer un temps infini là-dessus et donc créer des jeux vidéo qui ont du sens tant au niveau amusement que de le faire en étant responsable. Il faut donner un cadre assez clair pour que les personnes puissent arriver à leur but. Créer un jeu vidéo, ça prend deux ans, trois ans, voire beaucoup plus et donc de ne pas fatiguer les personnes, donner leurs bons jours de repos pour pouvoir justement être meilleur demain. Et puis de réfléchir justement dans un monde post-covid, toute cette flexibilité du travail afin qu’on puisse faire tant du boulot en présentiel dans les locaux qu’à la maison lorsque c’est permis, lorsque des infrastructures, dont les réseaux internes à l’entreprise, fonctionnent. Tout ça vers un but commun : que les personnes se sentent le mieux possible pour délivrer les meilleures expériences possibles.

Laura : Ça paraît être un super credo que les gens se sentent le mieux possible pour délivrer les meilleures expériences possibles. Ça m’amène assez naturellement à la question suivante, puisque ce que tu dis en filigrane, c’est la notion de valeur. Quels mots clés au pluriel ou au singulier tu utiliserais pour définir les valeurs d’Ubisoft ?

Mickaël : Les valeurs d’Ubisoft, c’est vraiment d’être créateur de monde, c’est-à-dire autant des mondes virtuels basés sur le réel, que des mondes 100% fictifs, peut-être une planète extraterrestre et avoir des personnages qui évoluent là-dessus comme pouvoir avoir des expériences qui sont dans des mondes qui sont des représentations historiques avec des éléments fictifs ou crédibles. Que tout le monde puisse s’exprimer à travers ces jeux là et donc dans la réalité. En tout cas, chez Ubisoft, je pense que c’est transposable. En fait, c’est que tout le monde puisse avoir sa propre expérience dans une entreprise aujourd’hui, qui est de plus de 20.000 personnes et créer son propre itinéraire et que cela fasse sens avant tout pour soi. Ensuite, effectivement que les personnes en face des managers, les autres collègues puissent répondre à ça positivement, qu’on puisse construire sa carrière, idéalement le parcours le plus en phase avec soi-même ! Je pense qu’Ubisoft essaye d’aller dans cette direction-là, c’est-à-dire si on a envie de d’être programmeur, peu importe son parcours, on doit pouvoir au moins en discuter. Évidemment, dépendant des challenges que l’on a en face, c’est plus ou moins compliqué. Mais en tout cas, Ubisoft permet cette discussion, de comprendre quel est son objectif professionnel, en cohérence avec le contexte actuel, en cohérence avec les productions de jeux vidéo en cours, en tout cas d’avoir cette oreille toujours bienveillante, même si ce terme est un peu galvaudé aujourd’hui. C’est hyper important de se dire que des personnes en face, que ce soit côté responsable hiérarchique peuvent embrasser la demande et de se dire si c’est possible : « faisons en sorte de construire ce chemin ensemble comme on le fait dans un jeu vidéo et de donner des éléments pour pouvoir progresser, grandir. » Si ce n’est pas possible, « voilà les chemins alternatifs qui sont possibles ». Toujours pareil, comme dans un jeu vidéo, que le champ des possibles soit le plus clair possible et amener vers une solution qui convienne à tout le monde. Après, évidemment, une fois qu’on a dit ça, il faut pouvoir avoir les outils et de faire le mieux possible. Je pense que justement, Ubisoft est en perpétuelle évolution. Dans un monde très compliqué, on se donne les moyens de construire et de mettre en place des outils pour que chacun et chacune puisse aller dans la direction qu’il veut par rapport à son chemin professionnel.

Façonner sa carrière comme on façonne son avatar

Laura : Ça m’a fait sourire quand tu disais « exactement comme dans un jeu vidéo », parce que c’est vraiment l’image que j’avais quand tu décrivais. J’avais un peu envie de faire la comparaison, de construire sa carrière comme on construit son personnage dans le jeu. Ça dépend des jeux évidemment. Il y a des jeux, on a des personnages qui sont déjà existants et on ne peut pas spécialement les customiser. Mais il y a plein d’autres jeux où c’est possible. Et typiquement, ça m’a exactement fait penser à ça. L’idée de regarder les chemins alternatifs, ça me fait penser aux quêtes secondaires qui nous permettent d’acquérir de l’expérience, avant d’aller s’attaquer aux grosses qu’on n’arrive pas à faire parce qu’on n’a pas assez d’expérience.

Mickaël : C’est vrai qu’en prenant cette image-là, il y a aussi le côté créer son propre personnage, son avatar. En fait, même ça, ça a évolué dans le jeu vidéo. Pour être très concret, il y a dix ans, quand il s’agissait de créer son personnage, on choisissait déjà le genre homme ou femme. Aujourd’hui, on est plus sur une question d’aspect, c’est-à-dire on choisit des aspects à ce personnage qui sont une base pour laquelle tu vas pouvoir justement ajouter des éléments, une coiffure particulière et le champ de customisation s’élargit pour avoir peut-être justement une représentation des cheveux qui soit à l’aune de ce qu’on a dans la vraie vie : des cheveux crépus, des cheveux lisses, différentes possibilité de couleur, la possibilité d’avoir une peau qui puisse être avoir une texture différente à voir. Si effectivement tu as un syndrome particulier qui fait que tu as l’équivalent de quelques taches sur la peau, que tu puisses pouvoir le reproduire aussi dans le jeu. Ça, c’est des choses qui évoluent sans cesse. Je pense que ce qui est important dans la culture d’entreprise, c’est d’être en phase avec la réalité des choses et la société dans laquelle on évolue. Voilà, c’est ça qui est fondamental.

Laura : Je suis à 100% d’accord, là-dessus. On a commencé à aborder la façon dont ça se traduisait dans la carrière des gens. Je suis curieuse de savoir comment ça se traduit au jour le jour dans la culture d’Ubisoft, ces valeurs, justement, de créer un peu son avatar, sa carrière au jour le jour ?

Mickaël : C’est une question pas facile à répondre. Disons qu’au quotidien, si je prends mon cas, comme je suis quelqu’un d’assez éclectique dans ma façon de m’habiller, dans ma façon de me présenter, j’aime bien dire je m’habille comme je veux. Si je vais m’habiller en costard, il n’y a aucun problème. Comme si je veux m’habiller en jogging ou aux claquettes chaussettes, normalement, ça devrait pouvoir déranger personne. Évidemment, il se peut qu’il y ait quelques remarques, mais idéalement que ce soient des remarques plutôt positives qui fassent sourire plutôt que quelque chose qui puisse être un mur et te renvoyer vers ton vestiaire. Je crois que j’ai perdu le fil de ta question, pardon.

Laura : Comment ça se traduit au jour le jour dans la culture ? Tu parlais du vestimentaire.

Mickaël : Tout à fait. Le style vestimentaire effectivement, on se rend compte que tout comme moi, les autres adoptent cette manière de penser ; c’est-à-dire d’être libre là-dessus et de ne pas être jugé quand tu te présentes à ton travail. Ensuite, il y a tout un tas de formation qui permet aussi ça. Chacun peut faire son pick-up là-dessus pour des formations obligatoires qui permettent d’avoir la même base commune pour justement travailler sur ces biais qui sont le plus souvent inconscients. Aussi derrière, de pouvoir ouvrir également les possibilités de recrutement et de moins rester sur la question du diplôme, d’être plus conscient des expériences de chacune et de chacun, peu importe d’où ces personnes viennent, et ça, on sent que justement, au quotidien, c’est une prise de conscience très forte. Que chacun travaille justement sur ces biais, sur toutes les choses qui étaient des freins pour l’évolution de telle ou telle personne ou de l’entrée de telle ou telle personne. Ce n’est pas toujours facile puisque c’est avant tout au-delà de la culture d’entreprise. C’est souvent les personnes, les individus qui construisent un collectif et donc il suffit que telle ou telle personne soit fermée à un sujet en particulier et tout d’un coup, on se retrouve devant un mur. Donc Ubisoft met plein d’outils en place, plein de possibilité de discussion, des tables rondes. En interne aussi, on a une semaine de la diversité qui est un peu le moment où tout se cristallise. Il y a plein d’autres moments dans l’année, mais c’est vraiment le moment un peu vecteur où on reçoit des personnes externes qui vont pouvoir faire du partage d’expérience en interne et vice versa. Le fait que je sois aujourd’hui chez toi pour donner notre expérience est hyper important et est une preuve aussi de cette ouverture et de montrer qu’on a des profils qui peuvent venir de partout. Même si le jeu vidéo reste un domaine tech et parce que la société a évolué comme ça, qui séduit avant tout plus les personnes qui se considèrent comme un homme, et qui ont cet attachement à développer, à programmer, puis ensuite à jouer des coudes pour monter en dans les échelons. Je pense qu’on essaie de casser ça. En tout cas, ça va être aussi des ateliers pour aller plus loin là-dessus et faire en sorte d’inclure plus de femmes et aussi des personnes en situation de handicap. C’est quelque chose qui est au cœur de la façon dont fait des jeux vidéo. Aujourd’hui, on parle d’accessibilité dans le jeu vidéo et donc de pouvoir mettre, même dans un jeu traditionnel, toutes les options pour que n’importe qui peut dépendant de ses possibilités, de ses attitudes, ses particularités, puisse avoir une expérience customisée et qui lui convienne. En gros, comme je dis toujours, une manette de jeu, c’est une sorte d’instrument qui peut être dissuasif. Eh bien, comment rendre cet instrument le plus lisible possible, peu importe ses particularités cognitives, motrices, visuel, etc. Pour essayer de conclure là-dessus, Ubisoft, c’est déjà apprendre sur le monde qui nous entoure et ensuite de faire jaillir tout ça en disant que c’est OK et on va faire en sorte de grandir en prenant en compte cette société, en allant beaucoup plus loin en interne avec des formations avec des personnes qui ont des grandes différences. J’espère en tout cas que ça ira toujours plus loin et toujours en phase d’apprentissage comme on doit l’être tous et toutes en permanence.

La représentation ethnique dans le milieu du jeu vidéo

Laura : Je l’espère aussi clairement, on en a besoin. On avait échangé avant d’enregistrer cet épisode. Tu disais que t’as eu le sentiment parfois de te sentir un peu comme un alien dans le monde du jeu vidéo, puisque tu es un homme noir. Et c’est vrai qu’il n’y a pas assez de représentation ethnique dans les différents secteurs des entreprises en général, mais notamment dans le monde du jeu vidéo. C’est important effectivement que tout le monde puisse trouver sa place. Ma question, qui est un peu une question d’approfondissement, c’est comment s’assurer qu’on fait un recrutement sans basculer dans la notion de tokenisation, c’est-à-dire qu’on n’embauche pas une personne en disant « regardez, on a atteint notre quota, on a quand même une personne noire par-ci, une femme par-là. » ? Comment Ubisoft fait ce travail pour justement ne pas risquer de basculer dans une idée de token, de façon aussi à ce que les personnes qu’on voit moins souvent ne se sentent moins comme des aliens au fur et à mesure des années qui passent ? Justement parce qu’on s’améliore en tant que société, je parle de société civile, mais aussi de société en tant qu’entreprise.

Mickaël : Ce n’est pas facile. Pourquoi ce n’est pas facile ? Simplement parce que je pense que chacun essaie de faire au mieux dans le sens où c’est d’Ubisoft dont je parle. L’entreprise a essayé de toucher tout le monde, qu’il faut se battre contre les idées reçues, qu’il faut se battre contre les personnes elles-mêmes qui peuvent être femme et se dire par exemple que l’annonce n’est pas pour elle. Si ce n’est pas pour toi directement, ça peut être pour une autre et comment est-ce qu’on construit et déconstruit aussi le meilleur chemin possible pour les générations futures ? Typiquement, pour moi, ça me concerne en tant qu’homme noir, je sais que j’essaie d’être un modèle. On parle de rôles modèles, en tout cas, j’essaye d’être un modèle d’ouverture, que ce soit pour les recrutements que je suis amené à faire, pour les prises de parole que je fais aussi dans le monde du jeu vidéo et de la tech en général, en disant notamment de casser cette idée du diplôme avant tout, de casser le fait qu’on dise que là, c’est pour les hommes, même si on ne le dit pas, parfois, ça peut se percevoir comme tel. Donc de d’améliorer la représentation tant dans les jeux qu’au niveau des prises de parole, d’avoir plus de personnes noires, des personnes ou avec des apparences ou des corpulences qui soient différentes, qu’ils soient le plus diverses possible afin que chacun puisse se sentir concernés. Pour moi, ça va aussi dans la pluralité des métiers de créer un jeu vidéo. Le meilleur parallèle que je puisse faire, c’est comme créer un film. Il y a des auteurs et des autrices. Il y a des personnes qui vont dessiner. Il y a des personnes qui vont faire de la musique. Il y a des comédiens et comédiennes de doublage. Il y a des artistes, des commandes, des performeurs qui vont faire des cascades et dont on va capturer le mouvement, de montrer le champ des possibles et de se dire « oui, toi qui es passionnée de chant, on peut faire une bande originale ensemble pour tel ou tel jeu, tu peux contribuer à mettre ta voix ou ton art au service de telle ou telle expérience ». Il y a la réalité virtuelle, il y a de la réalité mixte. Il y a encore un autre truc qui mélange la réalité virtuelle et notre réalité physique. Et tout ça, ça touche tout un tas de métiers tant les métiers de la création, mais aussi les métiers de support. Moi, je ne crée pas de jeu. Je suis côté relations avec les associations et les ONG. J’ai toujours voulu travailler dans une entreprise de jeux vidéo, mais je me suis aussi beaucoup battu pour que des personnes qui sont autour de moi, il y ait des personnes qui me ressemblent au moins un tant soit peu. Ça redonne confiance. En fait, ça casse le syndrome de l’imposteur et cette notion de tokenisation qui est qu’on a l’impression parfois d’être le seul ou la seule autour de soi. Et ça arrive encore, ça arrive encore. Quand je vais dans des salons, je m’arrête rarement au sens-là, sinon on déprime toute la journée. Mais parfois je suis le seul Noir dans cette assemblée de cinquante personnes. Alors, les gens diront « oui, mais c’est parce que ça intéresse moins les Noirs ». Je ne m’identifie pas aujourd’hui, quand je postule à un emploi ou que je vais un événement en tant qu’homme noir. Il y a des gens qui vont rencontrer d’autres personnes noires, c’est que quand on est dans le métro où il y a des personnes de tous horizons. J’aimerais que dans le jeu vidéo et que tout le monde pense ainsi en se disant « c’est ouvert à tout le monde ». Surtout, et je terminerai là-dessus, on n’a pas forcément besoin d’être excellent pour travailler dans le jeu vidéo, de se dire qu’on est le meilleur ou la meilleure. Ce n’est pas quelque chose que je soutiens. Je pense qu’à partir du moment où on a des aptitudes, qu’on sait réfléchir, on sait raisonner, on peut contribuer à une aventure collective, une aventure d’entreprise. Chez Ubisoft, comme dans n’importe quelle entreprise dans le jeu vidéo ailleurs, on doit pouvoir trouver sa place dans le métier qui nous convient, avec les aptitudes que l’on veut bien partager à cette entité.

Conclusion de l’épisode

Nos échanges avec Mickaël ont pris une forme en entonnoir. Nous avons d’abord abordé la culture d’entreprise sous un angle de stratégie des organisations pour aboutir à sa traduction dans la vie quotidienne via le style vestimentaire, en passant par la création de jeux vidéos.

Dans la deuxième partie de notre échange, nous approfondissons la notion de tokénisation ainsi que le positionnement de Mickaël, en tant que manager et homme noir.

Outro

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A très bientôt pour un nouvel épisode d’Inclusivement vôtre !